20/11/2003: M. Patrick Dewael, ministre de l’Intérieur, affirme que les objectifs du vote automatisé ont été atteints
Demande d’explications de Mme Clotilde Nyssens au vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur sur «le vote automatisé» (nº 3-55)
Mme Clotilde Nyssens (CDH). - La période est favorable, semble-t-il, pour évaluer les avantages et inconvénients du vote automatisé in tempore non suspecto, après les élections législatives au cours desquelles on a recouru au système de vote automatisé et avant les élections régionales. L’évaluation des opérations de vote lors des législatives de juin 2003 doit permettre de mieux affronter celles de juin 2004. La démocratie doit donner aux électeurs la possibilité de contrôler les opérations et garantir le secret du vote.
Les objectifs du vote automatisé ont-ils été atteints ? Le système nécessite-t-il moins d’assesseurs ? Est-il une réponse à la difficulté d’en trouver ?
Le système permet-il de réaliser des économies, notamment par la diminution des frais de papier et du nombre d’assesseurs ? Le coût des opérations n’est-il pas supérieur étant donné l’importance du matériel informatique et son amortissement ?
Le système a-t-il permis que le résultat des élections soit connu plus rapidement qu’avec le système traditionnel ? Des vérifications fastidieuses n’ont-elles pas démontré le contraire ? A cet égard, je me rappelle que le rapport des experts attire l’attention sur les difficultés survenues dans certaines communes, à Schaerbeek entre autres.
Le système est-il techniquement fiable ? Les erreurs apparues ne sont-elles pas le signe qu’il ne l’est pas ? C’est d’autant plus inquiétant que seules les erreurs produisant des résultats aberrants ont été détectées. Comment les électeurs peuvent-ils accorder leur confiance aux opérations électorales s’ils sont privés de toute possibilité de contrôle ? Cet aspect du problème retient particulièrement l’attention des groupes de citoyens qui poursuivent une réflexion sur le vote automatisé.
Le secret du vote n’est-il pas bafoué puisque l’électeur qui éprouve des difficultés à exprimer son vote peut se faire assister par le président ou par un autre membre du bureau désigné par lui ? Dans la pratique, les personnes non familiarisées avec l’informatique étant nombreuses - je songe notamment aux personnes âgées - les interventions des présidents et assesseurs auprès des votants sont monnaie courante, ce qui pose problème.
Les élections régionales seront-elles organisées sur le modèle des législatives ? Des améliorations sont-elles prévues ?
M. Patrick Dewael, vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur. - Le système nécessite effectivement moins d’assesseurs en raison de la disparition des bureaux de dépouillement. Il constitue dès lors une réponse aux problèmes rencontrés auparavant pour trouver des assesseurs.
Il est vrai que la réduction de la quantité de papier et du nombre d’assesseurs entraîne une diminution des frais. Le système n’ayant pas connu d’extension en 2000 et en 2003, les frais ont été limités. En outre, il est prévu que le matériel puisse être utilisé pendant une durée minimale de dix ans.
En ce qui concerne les élections de juin 2004, les dépenses électorales sont réparties entre les différentes autorités concernées, à savoir l’État fédéral, les Régions et les Communautés. Le coût du vote électronique par électeur et par élection, pour un amortissement du matériel étalé sur dix ans, est d’environ 1,50 euro.
Durant la nuit des élections du 18 mai dernier, les résultats électoraux ont été communiqués par les cantons au SPF Intérieur par le biais de différents canaux : téléphone, fax, transmission électronique. Quelque 66% des chiffres des bureaux de totalisation sont arrivés au SPF Intérieur entre 20 heures et 21 heures. Le matin du lundi 19 mai 2003, le pourcentage de résultats disponibles atteignait 96,20%, contre 86% en 1999. Cette progression est due au fait que 160 cantons sur 208 ont communiqué les résultats par voie électronique.
L’utilisation de ce mode de transmission devrait être accrue lors des prochaines élections, ce qui permettra d’obtenir les résultats dans des délais encore plus brefs. Le vote automatisé ne requiert pas de dépouillement ; il suffit d’additionner les résultats des différents bureaux de vote à l’échelon du canton. Cette opération de totalisation est en moyenne deux fois plus rapide qu’une opération de dépouillement manuel. Les résultats des cantons à vote électronique sont donc en général connus bien avant ceux des cantons d’importance comparable à dépouillement manuel.
Le collège d’experts chargé du contrôle des systèmes de vote et de dépouillement automatisés, collège institué par les différentes assemblées belges, n’a pas constaté de dysfonctionnements sur le plan technique lors de contrôles ponctuels réalisés dans les bureaux de vote le jour des élections. De même, lors de leurs analyses des codes sources, les experts n’ont relevé aucune anomalie dans les programmes.
L’incident survenu dans un bureau de Schaerbeek est, selon eux, très vraisemblablement un incident isolé, lequel a été détecté, d’une part, par le bureau de canton de Schaerbeek, qui l’a consigné dans son PV et, d’autre part, par le SPF Intérieur, au moyen de contrôles automatisés. Il a, du reste, été possible de remédier à cet incident, qui n’a dès lors eu aucune incidence sur le résultat des élections. Le collège en question a ajouté en guise de conclusion : « Même si les systèmes ne sont pas parfaits, l’ensemble des contrôles effectués permet de s’assurer du bon fonctionnement global du déroulement du vote électronique. L’objectif visé, à savoir émettre les votes, les enregistrer, les visualiser et les compter selon les dispositions légales, a été atteint. ».
L’électeur a la possibilité de contrôler son propre vote. Les experts faisant partie du collège doivent quant à eux être considérés comme des représentants indirects des électeurs, car ils sont désignés par le parlement, lui-même représentant direct de ces mêmes électeurs.
Je voudrais faire remarquer que, même lorsqu’il est fait usage du vote traditionnel, l’électeur moins valide peut se faire assister pour exprimer son vote. De surcroît, en vertu de l’article 104 du Code électoral, « les présidents et assesseurs des bureaux de vote, ainsi que les secrétaires des différents bureaux électoraux et les témoins des candidats prêtent le serment suivant : je jure de garder le secret des votes ». Le secret des votes me semble dès lors bien gardé par les différents membres des bureaux de vote.
De manière générale, on peut donc conclure de ce qui précède que les objectifs du vote automatisé ont été atteints.
Mme Clotilde Nyssens (CDH). - Le vice-premier ministre a répondu à la quasi-totalité de mes interrogations, et je l’en remercie. Le vote automatisé s’assimile, sur le plan technique, à un véritable acte de foi. Je peux comprendre que la validité du système préoccupe certains concitoyens, qui préféraient se fier à du papier et à un crayon plutôt qu’à une machine qui, par définition, est entre les mains d’experts. Il faut rester attentif au souhait des citoyens de ne pas voir bafouer le droit fondamental que constitue le droit de vote.
Ceci était un extrait de la séance plénières du Sénat de Belgique le Jeudi 20 novembre 2003.